Un des lecteurs de ce blog m’a demandé des renseignements sur l’hyperhidrose chez l’enfant. J’ai déjà rencontré ce type de question, aussi me suis-je dis que ça valait le coup d’étudier un peu les études parues sur ce sujet. Je ferai part aussi de mon témoignage, en précisant qu’il a peu de valeur mais qu’il peut peut-être illustrer et être plus dans le concret.
Pour une mise à jour sur les études sur l’hyperhidrose chez l’enfant en 2020 :
Que faire pour son enfant atteint d’hyperhidrose ?
Avant toute chose, consulter un médecin, idéalement spécialisé dans le domaine (endocrinologue, dermatologue). Ne pas hésiter à contacter des spécialistes de CHU, potentiellement plus au courant et à même de faire passer des examens pour déterminer si l’hyperhidrose est bien primaire.
Il est bénéfique de bien évaluer en quoi l’hyperhidrose gène votre enfant. Est-ce vraiment une gêne qu’il exprime fréquemment, ou plutôt un questionnement ? A-t-il l’air d’en souffrir, ou est-ce vous qui vous vous inquiétez pour lui ? Pour quels type d’activité ou d’interaction sociale cela le gêne précisément (tâches manuelles, jeux, regard des autres, activités de loisir…) ?
J’ai trouvé dans la littérature scientifique peu d’études qui se consacraient à l’enfant. Il existe cependant un document, disponible gratuitement ici en pdf (en Anglais), datant de 2010 et réalisé lors d’un séminaire sur les problèmes cutanés au Royaume-Uni, présentant la fréquence, le diagnostic, les traitements de l’hyperhidrose chez l’enfant.

Traitements de l’hyperhidrose chez l’enfant
Il y a peu d’étude des traitements chez l’enfant, et 1,8 % des enfants et adolescents de moins de 18 ans en seraient atteint (hyperhidrose axillaire seulement, une seule étude).
Le diagnostic se fait grâce à un examen clinique, comme chez l’adulte.
Les traitements sont peu étudiés dans la littérature. Ils ne concernent que quelques enfants, il est stipulé que ceux-ci doivent être réalisés dans les formes extrêmes et ne sont pas exempts d’effets secondaires potentiels (principalement hyperhidrose compensatrice après la chirurgie, ou perte de force musculaire après injection de toxine botulique).
Depuis 2013, des études sont parues sur l’intérêt des médicaments et de la ionophorèse chez l’enfant souffrant de transpiration excessive.
Études récentes testant les traitements de l’hyperhidrose chez l’enfant
Comme le document précédemment cité ne contenait finalement que peu d’informations sur les traitements, je suis allée faire un tour du côté des études de ces dernières années. Là encore, il y en a peu chez l’enfant. Les voici. Cet article est régulièrement mis à jour ; date de la dernière mise à jour avec les études récentes : janvier 2020.
Etude britannique de 2017 sur l’ionophorèse chez l’enfant
Etude sur l’ionophorèse chez l’enfant
Traitement : ionophorèse
Localisation de l’hyperhidrose : pieds, mains ou aisselles
43 enfants âgés de 8 à 17 ans ont eu des séances de ionophorèse. Les enfants ont réalisés 5 à 7 sessions d’ionophorèse.
Pour 36 enfants sur les 43 (soit 83 % des enfants) qui ont eu l’ionophorèse, la transpiration excessive a diminué selon eux. Il y a eu des effets secondaires chez la plupart des enfants : paresthésies (sensations désagréables dans les mains lors de la séance) chez 88 % d’entre-eux, démangeaisons et douleurs chez 26 %, rougeurs chez 14 %, sécheresse chez 12 % et chez un seul patient la formation d’une vésicule puis dermabrasion.
Étude brésilienne de 2013 sur les médicaments contre la transpiration chez l’enfant
Traitement : médicamenteux (Oxybutynin) pendant 6 semaines
Hyperhidrose palmaire
45 enfants de moins de 14 ans
Efficacité sur la diminution de la transpiration et la qualité de vie
!! Pas de groupe contrôle !! Alors que plutôt facile pour ce type d’étude de comparer à un placebo…
Résultats : 85 % des enfants avaient une diminution de leur transpiration modérée ou importante / 80 % des enfants avaient amélioré leur qualité de vie. Plus la qualité de vie initiale des enfants étaient basses plus elle a augmenté. Effets secondaires chez 55,5 % des enfants, le plus souvent bouche sèche.
Commentaire perso : cette étude n’a pas vraiment d’intérêt vu qu’elle ne compare pas la prise de ce médicament à la prise d’un placebo ou à rien.
Étude britannique de 2013 sur la sympathectomie chez l’enfant
Traitement : chirurgie (sympathectomie thoracique) (le plus souvent, sympathectomie bilatérale T2-T3)
Hyperhidrose palmaire
44 enfants, 4 filles pour 1 garçon, moyenne d’âge 12,8ans
Les enfants ont été suivis en moyenne pendant 1,3 ans après l’intervention (entre 0,2 et 7,7 ans)
21 % ont développé suite à l’intervention une hyperhidrose sévère d’autres parties du corps. 7 % ont développé une hyperhidrose axillaire sévère qui a nécessité une intervention chirurgicale vers l’âge de 14 ans. 9 % une hyperhidrose plantaire.
Il y a eu des complications après l’intervention chez 47 % des patients : douleurs nécessitant de rester plus de 48h à l’hôpital, syndrôme d’Horner, problème de PH.
93% des actes chirurgicaux ont été réussis
Commentaire : à nouveau dommage qu’il n’y ait pas de groupe contrôle pour voir si sans l’intervention, les enfants ne développent pas aussi une hyperhidrose d’autres endroits du corps. Il faudrait avoir accès à l’étude entière et pas seulement à son résumé pour savoir si l’hyperhidrose a vraiment diminué, il n’y a pas assez de détails.
Étude brésilienne de 2012 sur la sympathectomie chez l’enfant
Traitement : chirurgical (sympathectomie)
Hyperhidrose palmaire
45 enfants de moins de 14 ans divisés en 2 groupes : 30 ont subi la chirurgie, 15 ont constitué un groupe contrôle. Évaluation avant puis à 4 ans.
83,4 % enfants opérés ont ressenti une amélioration importante de leur hyperhidrose, 16,6 % une amélioration partielle. 80 % des non opérés ont ressenti une amélioration importante, 20 % une amélioration partielle. 76 % des enfants opérés ont grandement amélioré leur qualité de vie contre 13 % dans le groupe non opéré.
Commentaire : les statistiques sont incomplètes, on a l’impression que la différence n’est pas significative, pourtant les auteurs concluent à une efficacité de la chirurgie par rapport à rien. Dans le résumé, on ne parle pas des effets secondaires.
Étude brésilienne de 2009 sur l’injection de toxine botulique chez l’enfant
Traitement : injection de toxine botulique de type A
Hyperhidrose palmaire
9 enfants et adolescents(moyenne d’âge 11 ans) injectés entre 1 et 4 fois (moyenne 2), pas de groupe contrôle.
Évaluation de la quantification de leur transpiration et de leur qualité de vie à 1, 3, 6, 9 et 12 mois après le geste
Résultats : dans le résumé, on y a peu accès dans le détail, seulement que les injections sont efficaces pendant 7 mois…
Témoignage : mon hyperhidrose dans l’enfance et l’adolescence
J’ai remarqué que je transpirais plus que les autres à l’école primaire, parce que je devais me servir d’un buvard plié en 4 et changé plusieurs fois par jour, ou de mes manches de pull, ou de ma règle en plastique régulièrement essuyée sur mon pantalon, pour pouvoir éviter de tâcher mes cahiers et faire couler l’encre. Ce qui n’empêchait pas que mes papiers soient souvent gondolés.
Au collège, j’ai commencé à voir que je tachais mes vêtements au niveau des aisselles, mais j’arrivais à trouver des astuces, sans que cela me prenne trop la tête.
Au lycée, j’ai remarqué que je transpirais aussi des pieds, cuisses, des fesses, voire du visage, et ça commençait à être un peu pesant. Alors j’ai cherché les solutions qu’il existait, mais sans vraiment franchir le pas, je vivais bien avec, et cela me gênait peu socialement, personne n’était au courant à part mon copain et ma mère.
A la fac, ayant entamé des études de kiné, j’ai vraiment du me traiter, surtout par rapport aux attitudes et remarques des autres.
Maintenant, dans la vie active, ayant arrêté tout traitement, je transpire excessivement et je le vis bien.
Mais pour revenir sur l’enfance, j’ai remarqué a posteriori d’autres attitudes que j’avais développées sans doute gênée par la transpiration. Par exemple, dès mes premières années, je ne voulais jamais quitter mes chaussettes, quelle que soit la saison, sans doute gênée par la transpiration (ça me le fait toujours !). Ma mère s’est aussi rappelé que je transpirais énormément la nuit bébé, notamment du cuir chevelu.
Je pense être atteinte d’une forme assez importante d’hyperhidrose, mais n’ai pas ressenti le besoin de me traiter durant l’enfance. Le bénéfice potentiel des traitements m’aurait apporté quoi de plus ? Je n’ai vraiment pas souffert de ça pendant l’enfance, même si je trouvais ça bizarre. Je pense qu’il faut vraiment peser le bénéfice-risque propre à chaque enfant avant d’entamer un traitement, quel qu’il soit, en tout cas pour l’instant, étant donné la faiblesse des études sur le sujet.
Et vous, avez-vous un témoignage à apporter de votre enfance avec l’hyperhidrose, ou de la transpiration excessive chez votre enfant ?